Par Mythsouka Jean-Philippe
Dans le cadre des célébrations du centenaire de la sélection haïtienne de football, Sport Passion Info revient sur un moment charnière de l’histoire des Grenadiers : la double confrontation contre le club allemand Kickers Offenbach en janvier 1971, au cœur d’une période de rajeunissement de l’équipe nationale.
Sous la houlette du légendaire entraîneur Antoine Tassy, dit Zoupim, la sélection nationale entamait depuis janvier 1970 un vaste processus de rajeunissement. Tassy, soucieux de préparer l’avenir, injecta du sang neuf dans l’équipe en intégrant des jeunes talents issus de formations scolaires réputées comme le Collège Canado-Haïtien, le Lycée Louverture ou encore le Lycée de Pétion-Ville. Parmi ces jeunes prometteurs figuraient Emmanuel Sanon, Wilner Piquant, Wilner Nazaire (surnommé Kaiser Will), Ernst Jean-Joseph, Fritz André dit Plantin, Eddy Antoine, Arsène Auguste alias Pepe, Jean-Marie Jean-Baptiste, Leintz Domingue et Charles Pompon Vorbe.
C’est dans ce contexte que se présenta une opportunité en or : la visite du Kickers Offenbach, club allemand en tournée dans les Caraïbes. L’équipe venait tout juste de remporter la prestigieuse Coupe d’Allemagne le 29 août 1970 après un parcours impressionnant face à des géants comme le TSV 1860 Munich, le Borussia Dortmund, Eintracht Francfort, Nuremberg FC, et enfin FC Cologne, battu 2-1 en finale. Dans ses rangs évoluaient des joueurs de renom tels que Helmut Kremers, futur champion du monde en 1974, et Winfried Schäfer. Le tout était encadré par l’expérimenté Kurt Schreiner, assisté de Alfred « Aki » Schmidt.
Premier acte : une défaite frustrante malgré la domination
Le premier match vit une équipe haïtienne pleine d’envie et de fraîcheur dominer les débats sans parvenir à concrétiser. Avec 10 corners contre 3, 10 occasions nettes contre seulement 2 pour les visiteurs, Haïti impressionna par son jeu, sa vivacité et sa discipline tactique. Mais un pénalty manqué par le milieu Violettiste Philippe Vorbe changea le destin du match. En toute fin de partie, Kickers Offenbach profita d’une rare incursion pour inscrire l’unique but de la rencontre.
Malgré la défaite (0-1), les coachs allemands reconnurent le potentiel haïtien. Alfred Schmidt déclara :
« Excellent travail d’approche pour les Haïtiens, mais ils perdent leur lucidité à la phase décisive. »
Deuxième acte : la revanche de nos noirs et rouges
Quelques jours plus tard, lors de la revanche, les Grenadiers prouvèrent que la leçon avait été bien apprise. Toujours dans un Stade Sylvio Cator surchauffé, Emmanuel Sanon, encore inconnu du grand public, surgit en première période pour inscrire le but victorieux, servi idéalement par Gilles Formose. Score final : Haïti 1-0 Kickers Offenbach.
Ce succès fut plus qu’un simple match gagné : il symbolisait le début d’une nouvelle ère pour le football haïtien. Une ère qui allait culminer trois ans plus tard avec une qualification historique pour la Coupe du Monde FIFA 1974 en Allemagne.
En route vers la légende
À peine quelques semaines plus tard, le 17 février 1971, cette même sélection affrontait le mythique Santos FC de Pelé au Stade Sylvio Cator, preuve que le football haïtien entrait dans une nouvelle dimension.
Aujourd’hui, cette double confrontation face au Kickers Offenbach reste dans les mémoires comme l’acte de naissance d’une génération dorée. Une génération qui, sous la houlette de Tassy, marqua l’histoire et l’imaginaire du sport national.
