
Par: Jackenson Louis
Par un énième communiqué, la Fédération Haïtienne de Football (FHF), par la voix de son secrétaire général Patrick Massenat, a officialisé ce que beaucoup redoutaient déjà : les sélections U-15 féminine et U-14 masculine ne participeront pas aux compétitions régionales prévues en août 2025, respectivement au Costa Rica et à Trinité-et-Tobago. En d’autres termes, les graines du futur resteront au placard, pendant que le ballon roulera ailleurs, loin des rues désertées de Port-au-Prince.
Les raisons invoquées ? Toujours les mêmes refrains usés, mais tristement fondés :
Fermeture prolongée de la frontière ;
Services consulaires américains paralysés ;
Insécurité généralisée ;
Et surtout, un aveu à peine voilé : le manque de moyens.Mais au-delà du pragmatisme budgétaire, une question s’impose : à quoi bon semer, si on interdit à la jeunesse de pousser ?
L’argent sera donc « conservé », dit-on, pour les « priorités ». Et quelles priorités !
Une sélection U-17, qu’on enverra en Espagne, au soleil de l’Europe, pour se préparer à une Coupe du Monde qu’elle abordera dans un groupe taillé comme un piège à rêves : l’Égypte, l’Angleterre, et peut-être… l’illusion d’exister.
Et bien sûr, l’équipe senior, qui s’accroche encore au mirage d’un retour à la Coupe du monde, 51 ans après 1974, comme si ce glorieux passé pouvait masquer le désastre présent.
On en viendrait presque à philosopher : peut-on parler de développement du football dans un pays où la jeunesse est systématiquement sacrifiée sur l’autel de l’urgence ? Où former devient une opération de communication, et non un engagement structurant ?
Là où d’autres pays investissent dans les fondations, Haïti préfère repeindre la façade branlante du foot national. Car former, c’est lent, incertain, exigeant.
Le vrai drame ? Il ne réside pas uniquement dans le forfait de deux sélections. Il est dans ce système qui tourne en boucle, dans cette génération qu’on prive de visibilité, de compétition, et donc d’espoir. Pendant ce temps, les autres avancent. Et nous, on rédige des communiqués.
Haïti, terre de talent, mais aussi d’abandon.



